Déférence royale

En décembre 1840, soit plus de 19 ans après sa mort, les cendres du premier empereur des Français rejoignent sa France natale "pour reposer sur les bords de la Seine, au milieu de ce peuple français " qu'il a tant aimé.

Son cercueil restera dans la chapelle Saint-Jérôme des Invalides jusqu'au 2 avril 1861, date à laquelle, la translation des cendres vers le magnifique tombeau conçu par Louis Visconti et placé dans une excavation circulaire creusée sous le dôme, immense sarcophage de porphyre (1) rouge posé sur un socle de granit vert des Vosges. La cérémonie sera faite en comité retreint en présence de l'empereur Napoléon III, l'impératrice Eugénie, le Prince impérial et les Princes de la famille, le Gouvernement et les Grands officiers de la Couronne.

À l'été 1855, la reine Victoria d'Angleterre (1837-1901) est en visite officielle à Paris à l'invitation de l'empereur Napoléon III. Quelle ne fut pas la surprise du second empereur des Français lorsque la souveraine britannique lui demande de pouvoir aller se recueillir sur la tombe de son oncle, à savoir Napoléon Ier, ennemi juré de l'Angleterre pendant 23 années, sans oublier les incessantes luttes entre les deux nations durant les siècles précédents. Sur fond d'un « God Save the Queen » joué en sourdine sur l'orgue des Invalides, la reine s'avance lentement à travers l'église des Invalides jusqu'à la chapelle St Jérôme, au bras de l'empereur. L'orage commence à gronder...

Elle est accompagnée de son fils, le futur roi Édouard VII (1841-1910). S'adressant à lui, elle dit :

Allez, agenouille-toi devant le grand Napoléon.

Et c'est à ce moment précis qu'un terrible coup de tonnerre déchire le ciel parisien, illuminant la nef.

De retour sur son île, Victoria écrira dans son journal :

Eh bien cet éclair a marqué définitivement, je crois, la fin de l'inimitié entre nos deux nations.

(1) en fait du quartzite aventuriné de Finlande